Dans les milieux ruraux du Bénin, l’accès aux services en santé sexuelle et reproductive n’est toujours pas facile. Cela s’explique par la communication presque inexistante entre parents et enfants et bien d’autres facteurs. Aussi, le manque d’information traduit par l’ignorance des droits à la santé sexuelle et reproductive favorise la difficulté à accéder aux soins. Pourtant, ces services représentent un véritable levier de développement d’une communauté. Durant 12 mois, plusieurs adolescents et jeunes ont bénéficié d’une formation issue du projet ‘’MIITCHITE’’. Une initiative de l’Organisation pour le Service et la Vie à travers le consortium OSV/Jordan – ONG GRAFED – ROAJELF Bénin.
15 mois pour 150 jeunes outillés
Les jeunes provenant des milieux scolaires et extrascolaires des communes d’Aplahoué, Djakotomey et Dogbo connaissent désormais leur droit à la santé sexuelle et reproductive. « Les jeunes sont en mesure de s’exprimer, de parler de la sexualité devant leurs pairs, de savoir ce qu’est leur droit. Ils peuvent aller dans les centres de santé demander les services de santé de reproduction. Le changement a commencé par s’opérer dans le milieu extrascolaire ou celui scolaire. Nous avons constaté une timidité, une influence extérieure sur ces jeunes qui aujourd’hui sont épanouis et s’expriment librement devant les parents, devant les leaders religieux. » témoigne Pulchérie ACHADE de l’Organisation pour le Service et la Vie (OSV/Jordan). Ce bilan positif est le fruit d’une collaboration étroite avec les leaders religieux et surtout avec les parents.
Un pari pas gagné d’avance
Les difficultés rencontrées au cours de la mise en œuvre de cette activité se résument à la réticence de certains parents. Ceux-ci n’ont pas compris plus tôt de l’intérêt du projet avec les adolescents et jeunes. Selon Pulchérie ACHADE, « Ces parents refusent d’accepter que leurs enfants aillent sensibiliser leurs camarades. Ils se rapprochent de nous pour comprendre ce pour quoi les enfants sont avec nous ». Grâce à la sensibilisation et l’aide des leaders religieux, les parents ont compris l’enjeu. Ils constituent dorénavant l’accompagnement phare dans la lutte de droit à l’endroit des adolescents et jeunes en matière de sexualité. Cela prouve le poids de l’implication des parents dans la formation des jeunes sur le plan de la santé sexuelle.
Le jeu en valait la chandelle
Dans le milieu, le problème est réel. Par ignorance de la vraie information, certains adolescent(e)s se retrouvent dans l’obligation de mentir à leurs parents. C’est le cas de cette jeune fille qui a témoigné au cours de l’activité : « Quand j’avais 13 ans, j’avais peur de parler à mes parents sur la sexualité. Le jour où je devais avoir mes premières règles, je ne savais pas de quoi il s’agit. J’ai paniqué. Ma maman m’a demandé si j’ai mangé quelque chose d’inhabituelle, mais je lui ai tout caché. Les premiers saignements sont intervenus à 20 h. J’ai dit à ma mère que c’était juste des plaies que j’ai contractées pendant que je faisais du sport à l’école. C’était faux. Finalement, elle m’a tout expliqué et j’ai désormais su comment prendre mes précautions. »
Un autre adolescent présent à l’activité a narré l’histoire de son ami Prudence. La petite amie de Prudence est aujourd’hui enceinte. Au départ, il a nié la grossesse en s’appuyant sur le fait qu’il s’est toujours protégé durant les rapports sexuels. Après les explications sur la méthode de port du préservatif, il s’est rendu compte qu’il pourrait bien être le père du bébé. Parce qu’en réalité, il n’a souvent pas bien porté le préservatif. Autant de situation dans le quotidien des adolescents et jeunes qui n’ont besoin que de la bonne information. Cela éviterait les cas de grossesses prématurées, les infections sexuellement transmissibles et d’autres maux auxquels la couche juvénile est confrontée.
De véritables échanges engagés avec les leaders religieux
L’un des axes sur lesquels s’est particulièrement positionné le projet est d’engager des discussions avec les leaders religieux des communes concernées. Ces derniers étant grandement impliqués au sein de leurs communautés, ils sont de véritables vecteurs afin de favoriser la diffusion des informations liées aux droits des adolescents et jeunes à la santé sexuelle et reproductive.
Ils ont donc été formés sur la thématique à cet effet. Ce projet a également facilité le dialogue entre eux et les jeunes sur leurs droits en matière de sexualité. Ils ont pu les écouter dans le but de comprendre leurs craintes et les expériences que vivent la plupart d’entre eux au quotidien. De quoi susciter leur engagement en vue d’un changement réel.
Écoutez l’interview avec la coordonnatrice du projet Pulchérie ACHADE