Porter la voix des femmes au cœur des processus de paix, tel est le pari du projet « Pour des agendas féministes : Paix et Sécurité africaines de l’Ouest et du Sahel solidaires pour la paix ». Ce projet a été officiellement lancé le 10 décembre 2024 au siège de l’ONG Filles en Actions. Aujourd’hui encore, les femmes d’Afrique de l’Ouest et du Sahel restent marginalisées dans les négociations de paix. Ce projet vise à démanteler ces inégalités en plaçant les femmes et les jeunes au centre des décisions. Avec le soutien d’un consortium d’ONG et de partenaires internationaux, il s’engage à bâtir un avenir où paix et égalité reignent.
« La paix que nous recherchons est une paix féministe »
C’est l’une des phrases fortes issues du discours de Brian SOSSOU, présidente de l’ONG Filles en Actions, a donné le ton de la conférence en partageant une vision claire. Inspiré de la Résolution 1325 des Nations Unies, le projet s’attaque à une injustice longtemps observée. En effet, bien que les textes internationaux reconnaissent l’importance des femmes dans les processus de paix, leur exclusion demeure problématique. « Nous ne pouvons plus accepter que les femmes soient tenues à l’écart », a-t-elle martelé.
De plus, à peine 4 % des signataires des accords de paix sont des femmes. Plus loin, seules 11 % des équipes de médiation intègrent des femmes. Pendant ce temps, sur le terrain, les femmes subissent les pires conséquences des conflits. Elles sont déplacées, deviennent cheffes de familles monoparentales. Bien trop souvent, elles sont victimes de violences sexuelles et utilisées comme armes de guerre. « Pourtant, ce sont elles qui portent l’espoir d’un avenir meilleur », selon Brian SOSSOU. Ce projet leur offre une opportunité de prendre part activement à la construction d’une paix plus juste, plus inclusive et véritablement humaine.
Le projet pour un Sahel solidaire pour la paix
Le projet « Pour des agendas féministes : Paix et Sécurité africaines de l’Ouest et du Sahel solidaires pour la paix » est une initiative qui vise à transformer les approches traditionnelles de la gestion des conflits et de la paix. Il est porté par un consortium international d’organisations féministes, dont EQUIPOP, Diakonia Sweden et le Gorée Institut. Plus clairement, ce projet s’attaque aux inégalités de genre qui excluent encore les femmes et les jeunes des processus de décision. Il intervient dans six pays : le Bénin, le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Niger, le Tchad et le Togo.
Le projet s’articule autour de trois axes stratégiques. D’une part, le renforcement de la participation des femmes et des jeunes dans les processus de paix. D’autre part, le développement leurs capacités en leadership. Enfin, le soutien de leurs actions collectives par des stratégies de plaidoyer. Au Bénin, 10 organisations, dont le Réseau national féministe Filles en Actions, ont été sélectionnées pour mettre en œuvre ce projet. À terme, le projet entend également apporter une réponse aux défis spécifiques des femmes dans les zones touchées par l’extrémisme violent, en particulier dans les régions frontalières comme l’Atacora et l’Alibori.
Une paix durable nécessite l’inclusion des jeunes et des femmes
Pour Emmanuel GANSE, président de l’Institut TONAFA, la paix et la sécurité sont essentielles à la vie, tout comme le lait maternel l’est pour un nourrisson. « Sans elles, aucun besoin humain ne peut être satisfait », a-t-il déclaré. Il a souligné l’urgence d’agir face à l’insécurité croissante dans le nord du Bénin, qui expose les communautés locales à des violences, des enlèvements et des pertes humaines, tout en menaçant les droits durement acquis des femmes. Il a averti qu’ « Il ne faut pas que nos villes deviennent les prochains Kaboul du Bénin » et a insisté sur le rôle des jeunes dans la préservation de l’unité nationale. Dans cette optique, il appelle à des actions d’éducation, de résilience et de coproduction de la sécurité entre les femmes, les jeunes et les forces de défense.
Maître Huguette BOKPE GNACADJA, présidente de l’Institut national de la femme, a quant à elle rappelé que les femmes, malheureusement marginalisées, jouent un rôle central dans la gestion des crises. « Les femmes et les jeunes occupent une place prépondérante dans la lutte pour la paix et la sécurité », a-t-elle affirmé. Elle explique que l’absence de paix exacerbe les tensions dans les familles, créant des crises à la fois sociales et économiques. Pour elle, intégrer les femmes dans les processus de résolution des conflits est une condition incontournable pour garantir une paix durable et équilibrée.
Le lancement de ce projet s’est tenue lors de la célébration du 76e anniversaire de la Déclaration universelle des droits humains, une date choisie à dessein selon Brian SOSSOU.